« L’Expérience Almodóvar » est-elle concluante ?

Aujourd’hui, on se penche sur le moyen métrage Strange Way of Life de Pedro Almodóvar, présenté en diptyque avec La Voix Humaine, un autre film court du cinéaste espagnol, dans le cadre de L’Expérience Almodóvar que vous avez choisie sur Instagram (merci à tous les votants et votantes !).

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Les courts et moyens métrages sont deux excellentes façons pour de jeunes réalisateurs et réalisatrices de découvrir les réalités d’un tournage sans la « pression », souvent plus importante, d’un long métrage.

Ce format permet de se tester, d’expérimenter et de se faire repérer grâce aux nombreux festivals qui se déroulent chaque année en France (coucou au Festival Européen du Court Métrage de Bordeaux par exemple !).

C’est une rampe de lancement essentielle, pour ne pas dire indispensable, vers le long métrage pour tout réalisateur ou réalisatrice désireux ou désireuse de faire ses preuves.

Beaucoup délaissent ensuite le court métrage une fois cet objectif atteint.

Ce n’est pas le cas de Pedro Almodóvar, qui est un des rares cinéastes reconnus, à réaliser encore des courts métrages régulièrement.

Il nous offre ainsi cette année, Strange Way of Life, un western intimiste porté par deux figures du cinéma américain contemporain, Pedro Pascal et Ethan Hawke.

Nous sommes en 1910. Silva (Pedro Pascal) chevauche dans le désert pour retrouver Jake (Ethan), son meilleur ami et ancien amant qu’il n’a pas vu depuis 25 ans. Mais ce désir de retrouvailles n’est pas sa seule motivation…

Almodóvar est parti à Almería en Espagne, sur les traces du Maestro Sergio Leone (qui y a réalisé sa fameuse trilogie du Dollar entre 1964 et 1966) pour filmer cette histoire d’amour en colts, plus complexe qu’il n’y paraît.

On y retrouve sa mise en scène élégante, son goût pour les couleurs vives (le rouge évidemment !) et la finesse des dialogues, qui travaille beaucoup les non-dits.

Le duo Pascal-Hawke fonctionne très bien, on sent qu’il y a une vraie attraction entre leurs deux personnages, même s’ils ne semblent pas parvenir à tout se dire…

C’est justement cette absence de franchise qui rend leur relation particulièrement intéressante. Elle pose aussi la question de l’évolution des sentiments avec la séparation et les années passant…

Mais c’est un peu près tout malheureusement !

En effet, le film ne raconte pas grand chose de plus, hormis une histoire de meurtre, bien trop expédiée pour apporter un véritable enjeu…

On ressort extrêmement frustré de cet exercice de style parce qu’il ne va pas au bout : on aimerait en savoir plus sur ce couple, sur l’évolution de leur relation.

Jake semble avoir du mal à assumer cet amour (pourquoi ? même si on s’en doute un peu) et on a envie de savoir ce que l’avenir réserve à ces deux hommes, mais au lieu de cela, on a… le générique !

Ce film offre un éventail de possibilités, malheureusement pas exploitées…

À la suite de cette première projection, on découvre La voix humaine (2020), un incroyable seul en scène (inspiré de Jean Cocteau) assuré par l’hypnotique Tilda Swinton (connue pour son rôle de la terrible Sorcière Blanche dans Le Monde de Narnia : chapitre 1 (2005)).

Le rouge encore et toujours… (© Iglesias Mas)

Elle incarne une femme qui attend désespérément que son ex amant vienne récupérer ses affaires chez elle… Mais il tarde à venir.

La femme délaissée est alors seule avec le chien de l’être absent…

Finalement, le téléphone sonne : c’est lui au bout du fil…

Son ex-compagne abandonnée profite de la conversation pour vider son sac comme jamais.

Tilda Swinton arrive à faire exister son interlocuteur par la seule force de son interprétation très intense, c’est impressionnant !

Sa performance marquante prend encore une autre dimension quand un plan en plongée révèle que son appartement n’est en réalité qu’un décor de cinéma… matérialité de l’impossibilité du personnage à affronter le réel, sa rupture amoureuse en particulier… Fascinant !

Ainsi, La voix humaine atténue la frustration de son prédécesseur grâce à la prestation bluffante de Tilda Swinton qui porte le film à elle seule !

Cela rend L’Expérience Almodóvar plutôt intéressante, bien que moyenne dans l’ensemble.

Mais quelle joie de revoir des courts métrages au cinéma, en dehors des festivals !

Ce plaisir là vaut le déplacement à lui tout seul !

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Cinécity Nouméa/YouTube

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