Un « ours » jurassien et de « L’Amour au présent » !

On commence l’année dans les salles obscures en vous donnant la parole, mes cher(e)s abonné(e)s !

Au travers d’un sondage proposé sur mon compte Instagram, il y a quelques jours, vous avez souhaité connaître mon humble avis sur, non pas un, mais deux films, au rayon des sorties : Un ours dans le Jura de Franck Dubosc et L’Amour au présent  de John Crowley, tous deux à l’affiche depuis le 1er Janvier.

Direction donc, les montagnes jurassiennes pour la troisième réalisation de Franck Dubosc, quatre ans après sa comédie gentillette Rumba la vie.

Disons-le honnêtement, en pénétrant dans la salle, je m’attendais un peu à une proposition du même acabit, pleine de bons sentiments et de gags, à la gloire de l’interprète de l’interprète de Patrick Chirac dans les films Camping (2006, 2009 et 2015) signés Fabien Onteniente, avec, quand même, un soupçon de polar pour faire genre…

Bien mal m’en a pris !

Franck Dubosc incarne un homme réservé, taiseux (presque effacé !) dont la vie bascule après un accident de voiture, qui lui donne accès à un gros paquet d’argent…

Le pauvre est un peu dépassé par cette situation rocambolesque et c’est sa femme (Laure Calamy), qui va décider de tirer partie de la situation, tandis que les gendarmes sont désarçonnés par cette scène de crime déconcertante…

Franck Dubosc s’essaie, avec succès, à l’humour noir sanglant et prouve qu’il y a une vie, en dehors de la « comédie industrielle » (souvent calibrée pour le Festival de l’Alpe d’Huez) dans le Cinéma Français !

C’est drôle, décalé et truffé de rebondissements bien amenés !

Les personnages sont bien campés grâce à une excellente direction d’acteurs et d’actrices, mention spéciale à Laure Calamy, parfaite « en directrice des opérations » face à son mari, un peu paniqué, sans tomber dans l’exagération.

Timéo Mahaut incarne le jeune fils du couple et impressionne par sa présence naturelle à l’écran.

Une confirmation après sa prestation remarquée dans le court-métrage Frater de Valentin Guiod (présenté et récompensé du prix du Jury au Festival Européen du Court-Métrage de Bordeaux, l’année dernière).

Bravo également à Benoît Poelvoorde, très juste en gendarme un peu déprimé mais moins dépassé qu’il n’y paraît…

Signalons enfin la participation d’Emmanuelle Devos pour un petit rôle détonnant et fort amusant.

En résumé, Un ours dans le jura est la bonne surprise de ce début d’année !

Avec ce film, Franck Dubosc montre qu’il peut sortir de son sempiternel personnage de dragueur lourd et faire preuve de subtilité.

On passe un vrai bon moment devant ce film étonnant, au point que l’on pardonne ses… excès de timidité.

En effet, c’est un premier essai pour Franck Dubosc dans la comédie noire et on a le sentiment durant la projection qu’il n’ose pas aller totalement à fond dans l’humour noir et qu’il a le frein à main mais, peu importe, tant le vent de fraîcheur souffle bien dans les belles montagnes enneigées du Jura.

Franck Dubosc et Laure Calamy (© Julien Panié – 2024 GaumontPour toi Public productionsFrance 2 Cinéma)

Changeons maintenant de registre : place maintenant au drame romantique L’Amour au présent de John Crowley.

Andrew Garfield et Florence Pugh (© Peter Mountain / Studiocanal GmbH)

Tout comme pour Un ours dans le jura, j’étais un peu circonspect en me rendant à la projection, m’attendant à une histoire d’amour un peu « tire-larmes »

Le film s’ouvre sur Almut (Florence Pugh) faisant son jogging, récupérant des œufs frais dans son poulailler pour concocter une chantilly au sapin, et la faire goûter à son compagnon Tobias (Andrew Garfield), encore endormi dans leur lit (avec un joli effet graphique des noms des comédiens qui apparaissent littéralement à côté d’eux).

Cette dernière scène est particulièrement bien éclairée par le directeur de la photographie Stuart Bentley, ce qui crée une atmosphère chaleureuse et une sympathie immédiates pour ce couple magnifiquement assorti, grâce à l’alchimie évidente entre les deux comédiens.

Il prennent plaisir à faire évoluer cette relation au fil du temps, par petites touches, entre passé et présent.

John Crowley choisit, en effet, de construire son film autour d’allers-retours temporels pour dynamiser son récit mais aussi, impliquer les spectateurs qui doivent rassembler régulièrement les pièces du puzzle pour retrouver le fil de l’histoire.

On peut ainsi admirer le talent de Pugh et de Garfield dans diverses situations, sans tomber dans la monotonie d’un déroulé linéaire.

Cela permet également, au réalisateur, de ne pas surcharger l’ensemble en pathos au moment où une épreuve survient, par exemple, en nous offrant des petits moments de bonheur de la vie du couple et même de l’humour (la scène d’Andrew Garfield en peignoir est géniale !).

Le film est là aussi pour nous dire que, malgré les difficultés, la maladie, la souffrance… la vie peut offrir de la joie et même des défis (les Bocuse d’Or).

Florence Pugh développe un jeu minimaliste et ciselé.

Elle est aussi à l’aise dans un blockbuster, que dans un film indépendant et plus intimiste comme celui-ci : l’économie de moyens ne signifie pas forcément l’économie de talents !

Tout comme sa camarade jeu, Andrew Garfield est très juste en mari, soutien indéfectible de sa compagne, lui non plus n’a pas besoin d’un costume de super-héros pour briller.

Le cinéaste évite donc l’écueil principal du « trop plein de pathos » souvent inhérent à ce type de drame, grâce à un montage bien pensé et à deux interprètes capables d’une grande subtilité dans l’interprétation de leurs personnages.

Qui plus est, Donald Reignoux et Kelly Marot accompagnent parfaitement la justesse de jeu de leurs alter égos anglais dans la langue de Molière.

Seul petit bémol à cette production anglo-française (cocorico!), le montage éclaté qui n’a pas que des avantages et peut perdre les spectateurs à la longue (le puzzle peut être fatiguant au bout d’un moment)…

Un grand merci en tous cas, à vous, mes cher(e)s abonné(e)s, de m’avoir incité à découvrir deux belles réussites pour bien démarrer l’année.

Pour aller plus loin :

Ma critique de Frater de Valentin Guiod, avec Timéo Mahaut

Sources :

Image d’en tête : montage personnel

Fiches films :

Un ours dans le jura, Secrets de tournage, allocine.fr (lien)

L’Amour au présent, Secrets de tournage, allocine.fr (lien)

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