FIFIB 25 : Mes coups de cœur ! 😍

En ce jour de sorties, je prolonge le plaisir du Festival International du Film Indépendant de Bordeaux en vous dévoilant mes trois coups de cœur !

On commence avec L’Agent Secret du cinéaste brésilien Kleber Mendonça Filho, présenté en avant-première au Cinéma Utopia, et qui a valu à son réalisateur, le prix de la mise en scène, au dernier Festival de Cannes.

Wagner Moura dans L’Agent Secret

Cette séance à l’Utopia est également un peu particulière car, ainsi que l’explique Nathan Reneaud (enseignant en Cinéma et ancien programmateur du FIFIB), Kleber Mendonça Filho a écrit ce film pendant un an et demi au sein même du Cinéma !

Nathan Reneaud (LinkedIn)

En effet, après avoir fui son pays dirigé alors par Jair Bolsonaro, il s’est installé à Bordeaux et est venu chaque jour à l’Utopia pour voir des films et écrire le sien.

Le résultat nous plonge en 1977, dans le Brésil de la dictature… Marcelo (Wagner Moura, vu récemment dans Civil War (2024) d’Alex Garland), un quadragénaire revient à Recife pour y construire une nouvelle vie avec son jeune fils et ses beaux-parents.

La petite coccinelle jaune, qu’il conduit, roule et semble rayonner sur la petite route de campagne, suggérant un avenir radieux pour lui… jusqu’à ce panoramique, couplé à un travelling latéral, qui suit le petit véhicule vers une petite station-service,  et nous dévoile un cadavre à l’air libre, à peine dissimulé par un simple carton… 

Au travers de cette séquence, le cinéaste brésilien montre que l’horreur est là, au cœur même du quotidienpire, elle apparaît banale !

Ainsi, les policiers qui débarquent dans la foulée à la station-service n’ont cure du corps en décomposition scandaleusement abandonné… ils sont uniquement là pour la coccinelle jaune de Marcelo !

La tension est là, pendant tous les échanges entre les policiers et le nouveau venu MarceloMendonça Filho le souligne en mettant en parallèle les pieds du pauvre homme contrôlé avec ceux du cadavre

Sa mise en scène et sa réalisation dépeignent à merveille la peur, la corruption et le danger permanent dans lesquels vivaient les gens à cette époque…

Le trouble du spectateur est accentué en osant brillamment mêler les temporalités, au point de véritablement le surprendre, de le perdre et de déjouer ses attentes !

Précisons pour illustrer ce dernier point que L’Agent Secret n’est pas un espion à la James Bond à proprement parler mais plutôt un homme tentant de renouer avec son jeune fils et de retrouver sa mère en secret… 

Cette quête du héros est rendue encore plus immersive grâce la reconstitution soigneuse de l’atmosphère des années 70, le tout dans une ambiance très cinéphile.

L’intrigue s’articule autour du cinéma au sein duquel le beau-père de Marcelo travaille : Kleber Mendonça Filho y développe sa passion pour cet art et tout un arc autour de l’impact des Dents de la Mer de Steven Spielberg, qui cartonne dans toutes les salles du monde dans ces années-là !

Au-delà de cette reconstruction soignée du passé et d’une merveilleuse cinéphilie affichée, le film pose une vraie réflexion sur la trace que nous laissons pour ceux qui restent, en plus de la dénonciation légitime de la violence terrible, du mensonge et de la dissimulation d’une dictature

On en ressort émus et bouleversés, au point que l’on pardonne les quelques longueurs du déroulé, et surtout, l’existence d’une séquence de comique absurde qui atténue trop, à mon sens, la puissance du propos.

Une chose est sûre cependant : L’Agent Secret confirme l’éclosion d’un très bon cinéaste.

Passons maintenant du côté de l’animation.

Mon second coup de cœur du FIFIB 2025 est en effet, Arco, le film du dessinateur Ugo Bienvenu, en salles depuis cette semaine !

Il y crée une nouvelle mythologie autour des arcs en ciel.

Nous sommes en 2075. La technologie permet désormais de voyager dans le temps grâce à des combinaisons aux couleurs arc en ciel, justement.

Le jeune Arco rêve d’accompagner sa sœur et ses parents dans leurs voyages temporels mais il est trop jeune… Qu’à cela ne tienne, il finit par braver l’interdit et de tomber du ciel vers… le passé, qui est encore notre futur !

Ainsi, à l’instar de L’Agent Secret, Ugo Bienvenu joue, lui-aussi, avec la temporalité.

Il dessine un avenir où la majorité des métiers sont désormais assurés par des robots.

Bienvenu nous pousse ainsi à réfléchir par nous-mêmes à ce sujet délicat, sans pour autant imposer son point de vue.

Son univers apparaît aussi plus positif que beaucoup d’autres : le jeune Arco atterrit dans un monde, certes futuriste, mais qui semble plus en harmonie avec la nature.

Tout est lumineux, joyeux, coloré : le film choisit clairement de prendre le contrepied des visions angoissées et alarmistes désormais récurrentes dans les séries ou les longs-métrages et on respire !

Ce projet nous rappelle que le Cinéma est aussi pour réenchanter le monde particulièrement quand l’actualité se révèle trop souvent dramatique…

Ce n’est pas le seul contrepied pris par Ugo Bienvenu : il opte pour l’animation en deux dimensions pour donner vie à ses dessins, à son style et ce, à l’encontre de la majorité des projets animés actuels !

Il lie ainsi tradition (animation ancienne) et futur (via le sujet) dans une belle harmonie de couleurs.

Ce bel écrin coloré abrite une touchante histoire d’amitié. Arco déboule bien malgré lui dans une forêt, sous les yeux de la jeune Iris, qui va le prendre sous son aile.

Les péripéties que les deux amis rencontrent sont nombreuses et bien menées, on s’attache vraiment à eux.

Le film émeut enfin par son final qui amène là encore, mine de rien, à une autre réflexion intéressante autour des conséquences que nos actes peuvent revêtir parfois.

Avec Arco, Ugo Bienvenu démontre que l’animation traditionnelle peut encore procurer des émotions à l’heure du « tout 3D » dans l’industrie.

Embarquez vite pour ce voyage coloré original et émouvant !

Evoquons enfin une dernière histoire touchante, celle de la jeune Fatima dans le film La petite dernière.

Nadia Melliti dans La Petite Dernière (© June films Katuh studio Arte France mk2films)

Comme beaucoup de jeunes de son âge, elle se cherche, a du mal à accepter.

Hafsia Herzi est sans aucun doute l’une des actrices les plus talentueuses de sa génération.

Depuis 2010 et un premier court-métrage La Rodba, elle démontre (en plus !) un talent certain pour la réalisation.

Hafsia Herzi dans L’Amour des hommes (2018) de Medhi Ben Attia (©  4 A 4 ProductionsCinétéléfilms – Amel Guellaty)

La petite dernière (son troisième long-métrage) en est une nouvelle preuve !

Elle filme avec beaucoup de finesse et de douceur, l’émancipation d’une jeune femme en laissant la place aux silences et aux regards, souvent bien plus parlants que les mots.

La comédienne Nadia Melliti déploie toute sa justesse de jeu dans ce dispositif, elle fait vivre et ressentir (à merveille !) les non-dits dans lesquels vit son personnage.

Sa prestation impressionnante a été récompensé cette année, à juste titre, du prix de la meilleure actrice au Festival de Cannes.

On a déjà très hâte de découvrir ses futurs projets !

Pour l’heure, ne ratez pas celui-là, lui aussi, en salles depuis une semaine.

Cette 14e édition du Festival International du Film Indépendant de Bordeaux nous a réservé de belles découvertes, bravo aux équipes pour cette belle programmation !

Merci enfin pour le merveilleux accueil qui m’est offert chaque année en tant que blogueur ciné !

Pauline Reiffers, directrice du FIFIB, à la cérémonie de clôture (Facebook du Festival)

Rendez-vous est d’ores et déjà pris en 2026 !

Source :

Image d’en-tête : montage personnel

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