Un an après Elle s’en va, Emmanuelle Bercot filme une seconde fois Catherine Deneuve dans le cadre de son nouveau projet tourné dans le Nord… Heureusement, là s’arrêtent les points communs avec une production bien connue de Dany Boon… Mais surtout, nous allons voir que, malgré des qualités indéniables, ce film lorgne un peu trop du côté du Québec…
Le festival de Cannes est très chargé cette année pour l’actrice-réalisatrice Emmanuelle Bercot. Son nouveau film La Tête Haute fait l’ouverture, et elle est également en compétition avec Mon Roi dans lequel elle joue aux côtés de Vincent Cassel qui marque aussi le retour de Maïwenn sur la Croisette, 4 ans après le très remarqué Polisse (2011).
Mais concentrons-nous pour l’instant sur sa carrière de cinéaste, son nouveau film est visible dans nos salles depuis mercredi dernier, une oeuvre sociale qui met en scène le parcours chaotique d’un jeune délinquant. Il est suivi par une juge des enfants qui tente de lui faire prendre conscience de la gravité de ses actes et de l’aider à s’en sortir.
Catherine Deneuve incarne la magistrate en question, une femme combative, parvenant à garder la foi malgré l’impression de fatalité et de découragement qui peut l’envahir quand un individu qu’elle suit multiplie les délits malgré les mains tendues. Elle est évidemment excellente comme toujours, adoptant la douceur et la fermeté au bon moment (même si la scène de la main tendue justement, n’est pas vraiment crédible…).
Mais celui qui crève l’écran, celui qui justifie à lui seul qu’on aille voir le film c’est Rod Paradot, le jeune homme qui incarne Malony, le héros tourmenté. Sa prestation est d’une justesse impressionnante pour un acteur débutant. Sa fougue emporte tout ! C’est une boule d’énergie, toujours sur la brèche, qui peut exploser à tout moment…
Il est entouré par Benoit Magimel, lui aussi parfait en éducateur au passé trouble, mais surtout par une Sara Forestier méconnaissable en mère à problèmes dépassée par les événements et à l’hygiène dentaire douteuse… C’est toujours appréciable de voir des comédiennes n’hésitant pas à casser leur image pour se mettre au service d’une histoire.
Cependant, comme le suggère notre titre, le problème du film ne vient pas du casting mais de son sujet. On ne peut se départir d’une impression terrible de déjà-vu… On pense bien évidemment tout le temps à Xavier Dolan qui traitait du même thème l’année dernière !
Emmanuelle Bercot arrive donc un an trop tard, sans parvenir à la hauteur de son jeune prédécesseur en dépit tout le talent de ses acteurs.
Les enchaînements sont assez prévisibles et la réalisation assez « plan-plan »… On regarde en fait un reportage amélioré, sans retrouver la même audace dans la mise en scène qui manque d’aspérités même si (Dieu merci !), elle nous épargne les redimensionnements d’écran horripilants de Mommy !
L’ensemble reste assez sage et la conclusion assez convenue au ton résolument optimiste n’a pas le panache de celle de Dolan ! Merci une fois encore aux chaînes de télé qui produisent des films avant tout destinés à une diffusion à 20 h 50…
Emmanuelle Bercot propose donc un long-métrage qui fait penser à ces exercices de rédaction lorsque, enfants, le professeur nous demandait d’écrire un texte « à la manière de« . Bercot réalise donc « à la manière de Dolan » sans atteindre la même qualité que l’original comme souvent dans ce genre de cas, malheureusement.
Mais le plus gênant dans tout cela, c’est que le spectateur se dit que finalement, ce film n’est rien d’autre qu’une « machine taillée pour les festivals » : on applique une recette qui a fait ses preuves, pas plus tard que l’année précédente d’ailleurs… Une Recette que l’on peut résumer de la manière suivante :
sujet fort + acteurs forts = Prix du Jury.
Pas forcément de quoi garder La Tête Haute, tous comptes faits…
La note d’Etats Critique : 5,5/10
La Tête Haute.
Drame. France. Réal : Emmanuelle Bercot. Avec : Catherine Deneuve, Rod Paradot, Sara Forestier.
Le parcours chaotique d’un jeune garçon épaulé tant bien que mal par une juge des enfants et un éducateur…
Sorti depuis le 13 mai 2015.