Des « Premiers crus » bien bouchonnés !

Comme chacun sait, le vin est un secteur phare de l’économie du pays et le cinéma l’a souvent évoqué par le passé. Depuis ce mercredi, c’est le cinéaste Jérôme Le Maire qui choisit d’embrasser cette thématique avec Premiers crus, cinq ans après un premier film, Requiem pour une tueuse, un thriller assez improbable pour ne pas dire, franchement raté… 

Les choses s’annoncent donc assez mal pour ce nouveau millésime et la dégustation désagréable ne fera que confirmer les craintes préalables…

premierscrus

Il y a des jours comme cela où le critique passionné sent qu’il ne devrait pas pousser les portes battantes qui mènent vers les salles obscures devenues maintenant si familières, car il sent que le long-métrage qu’il a sélectionné cette semaine ne sera pas à la hauteur, en dépit de tout le battage médiatique d’une célèbre radio partenaire, spécialisée dans le sport…

Le film en question raconte l’histoire de François Maréchal (Gérard Lanvin), vigneron en Bourgogne de son état, qui a perdu la passion du vin après le départ de sa femme, tandis que son fils Charlie (Jalil Lespert) triomphe à Paris grâce à son Guide des meilleurs vins qui fait la pluie et le beau temps chaque année dans le milieu…

Mais il va devoir quitter son petit confort parisien pour venir en aide à un père criblé de dettes et tenter d’éviter la perte du domaine familial.

Comme vous vous en doutez à la lecture de l’introduction, ce postulat de départ ne fonctionne pas et ce, dès les premières minutes !

On découvre Jalil Lespert attribuant des notes à différents grands crus lors d’une dégustation à l’aveugle, c’est très bien, sauf qu’il n’est absolument pas crédible ! Il débite son texte sans y croire et lorsqu’il hume le vin, on dirait qu’il sniffe de la coke !

Ses partenaires de jeu sont au diapason, autrement dit, pas au niveau ! Gérard Lanvin se contente du service minimum en tirant la tronche pendant une heure et demi ce qui n’a pas dû être trop compliqué tant on a l’impression  de toujours le voir faire la gueule sur et en dehors des plateaux ! (C’était déjà le cas dans Les Lyonnais en 2011…).

À sa décharge, c’est peut-être le seul en adéquation avec son rôle de paysan acariâtre et franchement insupportable qui, en plus d’être caricatural, nous fait détester les campagnes et leurs plus illustres représentants…

Sa fille Marie (interprétée par Laura Smet) est totalement effacée, de même que son compagnon Marco (Lannick Gautry, récemment aperçu dans Le Mystère du Lac sur TF1), pourtant bras droit de Charlie lors de son retour sur le domaine…

La palme de la pire actrice revenant sans conteste à Alice Taglioni qui n’est même pas capable de jouer la tristesse correctement au moment où Blanche (son personnage) part en taxi pour rejoindre son mari américain alors qu’elle n’a d’yeux que pour Charlie…

Constatant son incroyable talent, on imagine l’équipe technique lui  verser des gouttes dans les yeux avant la prise pour l’aider… Même Droopy est meilleur qu’elle dans ce domaine !

Malheureusement, la distribution navrante n’est pas le seul handicap du film. Les personnages en eux-même ne sont qu’une succession de clichés désespérants.

Le scénario lui aussi déçoit énormément, tous les enjeux sont connus dès le départ : le père déprimé qui va s’opposer à son fils avant que, ô miracle ! Ce dernier ne relance le domaine grâce à de nouvelles méthodes de production (bio évidemment), favorisant ainsi la réconciliation entre les deux hommes mais, bizarrement on n’était pas trop inquiets à ce sujet !

Ajoutons bien sûr que le départ de Blanche n’était pas définitif puisqu’elle revient dans les bras de son véritable amour à la fin… Sans oublier qu’avant cela,  on nous avait servi le coup de la rivalité ancestrale entre les familles Maréchal et Maubuisson (Blanche appartenant à cette dernière évidemment…).

 Heureusement, nous oublions (un peu) ce scénario en pilotage automatique grâce à quelques répliques déjà cultes comme « faire du vin pour moi ça n’avait de sens que quand on était une famille » (sic) ou encore  « ici en Bourgogne y’a deux choses qui sont sacrées : la première c’est de faire le meilleur vin possible pour honorer la terre, la deuxième c’est la transmission »…

Les dialoguistes ont sûrement partagé quelques bonnes bouteilles avant d’écrire, impossible en effet de pondre des phrases aussi magistrales en étant sobre !

Mais ne soyons pas trop durs, oublions le jeu des acteurs catastrophique et le scénario ultra prévisible pour nous concentrer sur la réalisation de Jérôme Le Maire, peut-être rattrape-t-elle un peu l’ensemble, peut-être pouvons-nous au moins espérer voir de belles images de la Bourgogne… Que nenni ! Le cinéaste n’est même pas capable de sublimer cette région viticole pourtant pas dénuée de charme !

Les travellings aériens au dessus des vignes en rase-mottes sont affligeants et ne permettent pas de profiter de ces beaux décors. C’est du niveau d’un téléfilm France 3 et encore, l’émission Des racines et des ailes fait beaucoup mieux en terme de valorisation des paysages !

Mais le plus horripilant reste les dialogues, toujours filmés en champ-contrechamp sans la moindre variation…

Voilà pourquoi on estime que Premiers crus est effectivement bien bouchonné. Il prouve (tout comme En Équilibre il y a quelques mois) que tout un pan de du cinéma français ne vit que par, et pour la télévision, ce qui engendre un flot considérable de productions consensuelles,  sans la moindre audace scénaristique ou technique. C’est la prime à la médiocrité.

Mais cela fait le bonheur des chaînes qui profitent d’un stock de films pour les programmes télés du futur, qui remplira les cases prime-time sans froisser le CSA…

Peu importe qu’on méprise totalement le spectateur plus exigeant en lui faisant payer (souvent au prix fort) une piquette tout juste digne d’être mise en boîte…

On terminera cette diatribe en reprenant à notre compte une réplique « culte » du film pour en faire une maxime que producteurs, réalisateurs et distributeurs feraient bien de mettre plus régulièrement en oeuvre pour le pérennité du secteur :

« Au cinéma, une chose est sacrée : faire le meilleur film possible pour honorer le spectateur ».

La note d’Etats Critiques : 3/10

Premiers crus.

premierscrus2

Drame. France. Réal : Jérôme Le Maire.  Avec  :  Gérard Lanvin, Jalil Lespert, Alice Taglioni. 

Depuis que sa femme l’a quitté, le viticulteur François Maréchal n’a plus le goût de la vigne et est au bord de la faillite, à tel point que son fils Charlie, un œnologue parisien réputé, doit revenir pour tenter de sauver le domaine familial. Mais son père ne l’entend pas de cette oreille… 

Sortie depuis le 23 septembre 2015.

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