À la découverte de Burdigala Production (2/4)

Suite de notre entretien avec Olivier Bureau et Guillaume Baldy. 

Bureau-Baldy

Dans cette seconde partie, on parle de Bordeaux, des tournages sur la région, des plateformes comme Netflix, des coûts de production, et des projets de Burdigala…  

Revenons à Burdigala. Comment trouvez-vous les films que vous vendez ?

GB – Ce sont soit les producteurs, réalisateurs qui viennent nous voir, soit nous qui cherchons les films sur les festivals.

Pourquoi avoir basé la société à Bordeaux ? Ce ne serait pas mieux d’être à Paris ?

OB – Plus aujourd’hui. Au moment où on a créé la boîte il y a dix ans, on a fait la remarque.

En fait, à la base, je voulais même l’installer dans mon village à Génissac mais on m’a dit que ce serait mieux, plus parlant, plus sérieux, d’avoir un siège à Bordeaux.

Oui, pour l’international, cela parle aux gens.

GB – On a les yeux qui pétillent !

OB – C’est politique, aussi.

On voulait aussi décentraliser le cinéma. Il y a dix ans, sur la région, il n’y avait pas vraiment de structures, peut-être 4 ou 5, aujourd’hui, il y en a une quarantaine.

En 2012, le conseil régional a mis en place un programme qui donnait de l’argent à des sociétés qui viendraient s’installer. Beaucoup de sociétés parisiennes ont alors créé des succursales sur Bordeaux, qui font du long-métrage, qui en faisaient sur Paris.

Il y a beaucoup de tournages aussi sur la région.

OB – En permanence.

Il y a au moins deux tournages tout le temps. Déjà, parce qu’il y a une vraie politique : je crois qu’on est la 2e ou 3e région de France à donner le plus d’argent au cinéma. Cela va de l’aide pour s’installer, à développer des projets, au développement (écriture, production, post-production). C’est devenu un vrai pôle d’attraction.

Après ce n’est pas parce qu’on est sur la région, qu’on travaille avec la région.

Nous, on travaille à l’international et avec des chaînes nationales donc finalement, très peu ici. On commence à rencontrer les élus, les acteurs économiques, les confrères aussi.

Avec la nouvelle région « Nouvelle Aquitaine », la Charente est rentrée, on a englobé Angoulême qui est le pôle numérique national, voire le pôle d’animation européen.

Il y a beaucoup de studios d’animation, de jeux vidéos, d’effets spéciaux à Angoulême qui, maintenant, font partie de la région Nouvelle-Aquitaine.

Stratégiquement, ce n’est pas inintéressant en sachant que, nous aussi, on s’intéresse beaucoup à l’animation (nos premiers films en tant que vendeurs étaient de l’animation).

Aujourd’hui, on essaie d’être coproducteurs ou producteurs associés sur le prochain film d’Alê Abréu.

Quel est l’avenir du secteur par rapport aux plateformes comme Netflix ?

L’avantage qu’on dit des plateformes, c’est qu’elles font la part belle au cinéma d’auteur. Contrairement aux salles qui ne font plus le travail.

En même temps, le public ne suit pas, regardez la tête du box-office : c’est que des suites. Quand tu vois ce qui se passe, tu comprends que les exploitants n’ont pas envie d’aller vers les films d’auteur.

Les plateformes produisent ce cinéma-là, c’est pas cher à produire pour elles, elles ne peuvent pas produire 3 films à 50 millions comme les studios le font, elles préfèrent produire 100 films à 3 millions.

Il semblerait que l’avenir soit là mais on n’a pas vraiment accès à ces gens-là, Netflix, ils viennent à vous, c’est pas encore notre cas. On est bien contents de travailler régulièrement avec HBO en Europe de l’Est.

Et c’est rémunérateur malgré le piratage ?

Ça dépend. Les plateformes SVOD à abonnements (comme Amazon ou Netflix), ça l’est, car elles paient comme une chaîne de télé (beaucoup moins).

Pour la VOD, ça dépend aussi, ce qui marche le mieux, comme pour le DVD, c’est le film pour enfants. Mais on est aux prémices de cela, l’avenir dira si c’est vraiment intéressant ou pas.

Mais il va forcément falloir voir les coûts de productions à la baisse, parce qu’un film rien qu’en VOD ne sera jamais rentable.

Les films coûtent très très chers en France. C’est le pays ou le cinéma coûte le plus cher, et c’est bien d’une certaine façon car les gens gagnent bien leur vie (pour ceux qui travaillent) mais c’est toujours les mêmes qui travaillent, est-ce que c’est vraiment intéressant ? Je ne suis pas sûr.

Après cela permet de développer un savoir-faire, non ?

Oui mais c’est toujours les mêmes. Du coup, c’est eux qui font les prix. Rien qu’en Région Aquitaine, il y a beaucoup de tournages comme on disait, mais finalement les productions ne jouent pas trop le jeu.

Pour la « partie comédiens » par exemple : les rôles à pourvoir sont pourvus par des acteurs parisiens à 99 % et ce qui reste ici, c’est soit, des petits rôles d’un jour ou deux, soit de la figuration. C’est pas très intéressant pour un mec qui est comédien sur Bordeaux alors qu’il y a beaucoup de bons comédiens sur Bordeaux avec les théâtres privés qui tournent très bien.

Pour les techniciens c’est un peu pareil, tous les postes intéressants à pourvoir (type chef opérateur, opérateur son…), les postes un peu clés ne sont pas détenus par des gens d’ici mais par des gens de Paris qui sont amenés là le temps du tournage et après, les locaux n’ont accès qu’à des stages ou des postes de 3e assistant régie, 5e assistant réal etc…

C’est pas vraiment intéressant. Là, il y a vraiment un truc à faire, stratégiquement, pour un peu plus favoriser les locaux. Ne pas tant autoriser les productions à venir avec leurs équipes.

En plus [les productions] ont l’obligation (avec les subventions de la Région) de dépenser l’argent avec des locaux mais [elles] le dépensent dans la partie qui les intéressent moins, la cantine par exemple, ça va être des mecs du coin et la figuration.

GB – Pour revenir aux plateformes de streaming, c’est un peu comme la musique, ce sera les plus gros films qui seront mis en avant, toi avec ton film que tu as fait avec ta petite équipe, tu seras jamais vu, tu ne rentabiliseras jamais ton film… C’est toujours pareil.

On est noyé dans la masse…

GB – Voilà. Mais les plateformes de streaming permettent plus d’audace que les blockbusters etc…

OB – Après ça reste l’avenir. L’avenir n’est pas tellement dans les salles pour le cinéma d’auteur malheureusement.

En parlant d’avenir, quel est-il pour Burdigala Production ?

On aimerait produire d’autres choses, moins underground, plus « dans la lumière » mais du coup, c’est plus compliqué, c’est plus difficile, c’est des budgets plus importants.

Le cinéma de genre a cet avantage d’avoir un cinéma underground, bis, produit avec 3 ficelles et un caméscope (un téléphone portable maintenant) alors que pour le reste, faut toute de suite rentrer dans les règles.

GB – ça a un coût toute de suite.

Quels sont vos projets ?

OB – On en a pleins.

On a un projet d’adaptation de saga littéraire en série.

Il s’agit de La Dame de la Sauve, en référence à la Sauve Majeure à côté de Créon, qui est en fait une abbaye. L’auteur s’appelle Sandrine Biyi et elle va éditer le sixième tome au mois de décembre. Chacun d’entre eux se vend à plus de 10 000 exemplaires, c’est plutôt très bien. Donc on travaille dessus.

Mais c’est un sacerdoce, parce que c’est épique, c’est une série historique, cela fait tout de suite peur parce que cela veut dire chevaux, cela veut dire costumes, cela veut dire château, cela veut dire « cape et épée »…

En plus, nous on arrive, on n’a pas un gros bagage comme producteur, on a un bagage comme distributeur donc on n’est pas forcément rassurants pour les investisseurs, on essaie de trouver un autre chemin pour financer cela.

Tomes-sauve

GB – On a un projet de long-métrage ?

OB – On verra, on découpera pour celui qui nous donnera des sous…

GB – Parce que maintenant, on peut faire des long-métrages et les découper en une série d’épisodes de dix minutes.

OB – Avec Blackpills qui est une des plateformes d’avenir pour le format vidéo sur les téléphones et smartphones où on trouve des séries ou des films découpés en épisodes de 10 minutes que les gens regardent dans le métro, dans les bouchons…

GB – Donc on a un projet de film qui s’appelle Ecco. C’est l’histoire d’un astronaute qui s’échoue sur une île déserte et va devoir y survivre et découvrir les mystères qui s’y cachent.

OB – On va découvrir qui il est, qu’est-ce fait, d’où il vient, où il est etc… On en est vraiment aux prémices, l’écriture n’est pas terminée, mais ce serait quelque chose qui serait plus facilement réalisable parce que c’est un film qui peut se faire avec quelques centaines de milliers d’euros, peut-être 250, 300 000 €.

On pourrait le faire au Brésil, pas en France parce que cela serait beaucoup plus cher, on devra certainement partir tourner ailleurs.

Ce serait un projet tourné en Français ?

Ça dépendra des investisseurs. J’aimerais beaucoup. Mais aujourd’hui, ce genre de cinéma là est plus vendable en Anglais, même si le cinéma de genre fantastique indépendant comme cela « non anglais », se vend bien, mais toujours moins bien qu’en Anglais… On peut espérer le vendre 3 fois plus cher en Anglais, qu’en Français ou en Espagnol.

Fin de la seconde partie.

Liens :

Site officiel de Burdigala Production

Page Facebook et chaîne Youtube de Burdigala Production

Article Sud-Ouest sur La Dame de la Sauve.

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