« Jeanne du Barry » : Maïwenn montre et casse l’étiquette !

La semaine dernière, Maïwenn a créé l’événement en ouverture du Festival de Cannes avec sa fresque historique sur Jeanne du Barry, la dernière favorite du roi Louis XV.

Ce pourrait-il que l’ambition soit de retour ces dernières semaines dans le Cinéma Français ?

Le film Maiwenn arrive en effet après la sortie d’une autre super production en costumes : Les Trois Mousquetaires : d’Artagnan de Martin Bourboulon.

L’avenir dira si la tendance se confirme sur les projets à venir mais en tout les cas, il est fort agréable de voir que les producteurs commencent (un peu) à sortir du tout comédie bien lisse, trop habituel dans nos chères salles obscures…

Alors, le film de Maïwenn est-il à la hauteur de ces ambitions qui semblent apparaître ?

La réponse est oui.

Sa mise en scène fonctionne dès le début avec des très beaux plans d’ensemble qui accompagnent la narration de la jeunesse de Jeanne. Ces plans d’apparence simple, créent d’emblée une ambiance soignée, posée, on dirait des tableaux

Cette belle introduction ne dure pas et on entre assez vite, pour le mieux, dans le vif du sujet : Jeanne rencontre, son futur amant et mari, le comte du Barry (Melvil Poupaud) qui l’introduit à la cour de Versailles par l’entremise du Duc de Richelieu (Pierre Richard, excellent, tout en délicatesse) dans le but de lui faire rencontrer le roi et d’obtenir ses faveurs…

Le premier contact a lieu dans la Galerie des Glaces, il est silencieux mais intense : ils ne se lâchent pas du regard ! Jeanne brise d’ailleurs un tabou en regardant le monarque dans les yeux ! Murmures scandalisés de l’assemblée !

Cette scène pose les bases de la Jeanne du Barry dépeinte par Maïwenn : une femme qui ne s’en laisse pas compter en dépit de l’étiquette, ces règles folles qui régissent tous les rapports humains à la cour… une femme libre et moderne !

On en découvre tout le poids et l’absurdité dans une scène joliment amenée : après une première nuit d’amour avec le Roi, la jeune femme est guidée vers une pièce secrète par La Borde (Benjamin Lavernhe), le premier valet de chambre de Louis XV.

Benjamin Lavernhe, véritable révélation du film ! (© Stéphanie Branchu / Why Not Productions)

De son point d’observation secret, Jeanne du Barry ne manque rien du cérémonial fou qui accompagne le lever de Louis XV.

Les deux échangent des regards complices à travers le miroir sans tain qui les sépare, à l’insu des courtisans présents dans la chambre…

Cette séquence est à l’image de la relation Maïwenn-Johnny Deep.

Il y a une vraie alchimie entre eux, Deep campe un monarque secret et charismatique, peut-être un peu trop taiseux… On entend à peine son accent américain, son français est très correct.

Mais étonnamment, ce n’est pas lui mais Benjamin Lavernhe qui marque l’écran.

En tant que valet, il veille sur ce petit monde en soi qu’est Versailles, accompagne le roi dans ses volontés, sert à la fois de guide et de confident à la jeune du Barry.

Sa discrétion et sa connaissance parfaite des arcanes du Palais en font un élément indispensable à la vie de cour.

Benjamin Lavernhe l’incarne tout en douceur et en assurance. Il a parfaitement compris l’essence de son personnage. Son meilleur rôle depuis longtemps !

Plus globalement, la réalisation renoue avec un certain classicisme, loin de la vision très pop de Sofia Coppola dans Marie-Antoinette (2006) qui a pourtant fortement inspiré Maïwenn (elle découvre Jeanne du Barry, incarné alors par Asia Argento, en visionnant le film !).

La cinéaste confie ainsi :

« Je me sens immédiatement en connivence avec elle, elle me manque dès qu’elle quitte l’écran. Jeanne du Barry me séduit car c’est une looseuse magnifique.

« Peut-être parce que sa vie a des similitudes avec la mienne, mais ce n’est pas la seule raison. Je tombe amoureuse d’elle et de l’époque.

Je me plonge dans une biographie très complète d’elle. Le désir de faire un film sur elle est immédiat mais va être contrarié pendant dix ans par un sentiment d’illégitimité à m’en emparer. »

Un sentiment fantasmé car elle se révèle très à l’aise dans la peau de son héroïne, tout comme elle, elle se sent comme à la maison dans le luxe de Versailles, au grand dam des filles du roi d’ailleurs qui la détestent…

Elles tentent même d’ailleurs d’influencer la dauphine Marie-Antoinette à son arrivée au château pour l’inciter à répudier la favorite honnie…

On sent que le Palais fourmille d’intrigues, c’est excitant !

Malheureusement, on ne les voit pas, alors qu’on sait que Jeanne du Barry était au cœur de tout cela… En conséquence, le quotidien manque un peu de vie et paraît simplement régenté par les filles du monarque…

On aurait, par exemple, aimé voir son rôle de mécène, d’amie des artistes plus développé.

Quid également de l’actualité politique du moment ? On ne voit pas le roi gouverner, on ne voit de ses rapports avec son ministre Choiseul par exemple..

Le film se concentre un peu trop sa protagoniste principale (ce qui ce comprend, c’est son propos) et un petit peu de contexte n’aurait pas fait de mal pour rendre l’époque encore plus palpable.

Mais que ces petits bémols ne vous découragent pas de vous rendre à la cour de Louis XV, cela vaut le coup, ne serait-ce que pour l’atmosphère que Maïwenn a réussi à faire vivre.

Espérons que cela donne envie aux producteurs et aux productrices de faire rimer culture avec envergure !

source :

Image d’en-tête : © Stéphanie Branchu / Why Not Productions

Interview Maïwenn :

secrets de tournage, allocine.fr (lien)

2 commentaires

  1. Bonne prestation de Maiwenn par contre le casting de Depp est plus que discutable car en dépit de son titre, de sa position et de son rôle, la du Barry l’estompe.

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