Cinq ans déjà que le blog existe et que votre serviteur partage humblement ses joies et ses déceptions cinématographiques.
Mais le cinéma, ce n’est pas que des films plus ou moins bons dans des salles obscures…
Avant cela, il y a le tournage. Les acteurs donnent vie au film dans des décors. Ce sont ces mêmes décors qui vont nous intéresser dans une nouvelle rubrique Bordeaux fait son cinéma !
Pourquoi Bordeaux ? Tout simplement parce que c’est dans la capitale girondine que le créateur de votre blog préféré réside.
Pour cette première, gros plan sur La Reine Margot (1993) de Patrice Chéreau à l’occasion de sa diffusion sur Arte dimanche dernier.
1572. Marguerite de Valois (Isabelle Adjani), plus connue sous le nom de la Reine Margot, déambule dans les rues de Paris en quête d’amour physique, loup sur le nez.
Sur ce plan, on la voit de dos accompagnée d’Henriette de Nevers (Dominique Blanc). Les murs sombres, les gens affalés à même le sol boueux, montrent bien que nous sommes dans un quartier mal famé de la capitale…
Sauf que ce n’est pas la capitale ! Patrice Chéreau et son équipe ont choisi une rue de Bordeaux pour situer cette scène qui marque la rencontre entre Margot et son amant futur La Môle (Vincent Perez).
Il s’agit de la rue de la Tour du Pin comme on peut le voir en observant ces deux images.
Quelques années ont passé (23 ans), mais en tenant compte du fait que Chéreau tourne légèrement la caméra pour masquer le côté opposé de la rue, sans oublier d’ajouter mentalement la boue, on reconnaît bien le mur au fond à gauche avec ses jointures caractéristiques. Depuis le tournage, l’ouverture à droite a été comblée par une porte. On remarque aussi la marche trouée au fond à gauche presque dissimulée par une sorte de couverture dans le film.
On la voit mieux ici :
Notre chère ville de Bordeaux joue également la parisienne dans une scène plus tard dans le film. La Reine Margot grimpe un escalier qui débouche sur une rue jonchée de cadavres…
C’est la Saint-Barthélémy, l’un des épisodes les plus sombres de notre histoire.
Elle a lieu le 24 août 1572.
Le mariage de Marguerite de Valois n’est qu’un prétexte pour rassembler les dignitaires protestants et annihiler leur influence, en particulier celle de l’Amiral de Coligny sur le roi Charles IX.
Sa mère, Catherine de Medicis, ne peut plus tolérer cette situation et surtout la volonté de Coligny de faire la guerre à l’Espagne catholique en étant allié aux autres puissances protestantes.
S’ensuit alors une terrible nuit de violences où les « huguenots » trouvent la mort par milliers sous les coups de catholiques enragés. On dit que la Seine elle-même en devient rouge…
Dans la séquence qui nous intéresse et qui se situe donc après les massacres, Isabelle Adjani marche en réalité dans la rue Saint-Eloi.
Sur cette image, on repère en arrière-plan l’escalier gravi par Isabelle Adjani dans le film. La bordure est aujourd’hui sécurisée par une grille bien visible.
Sur le cliché suivant, on voit bien les éléments métalliques caractéristiques de notre époque.
Ces modernismes sont bien évidement anachroniques au XVIe siècle et doivent disparaître. La production a vraisemblablement opté pour des planches de bois dans ce plan avec Dominique Blanc.
On prend le contrechamp avec ce dernier plan.
Ce qui donne aujourd’hui :
Sur l’ensemble du film, Bordeaux n’apparaît que quelques minutes mais cela prouve que la province peut accueillir pour le meilleur des tournages de productions majeures.
Inutile de partir en République tchèque et en Belgique pour tourner Les Visiteurs 3 par exemple, comme le dénonce à raison le jeune vidéaste Durandal dans sa critique du long-métrage de Jean-Marie Poiré, actuellement en salles.
L’auteur remercie son ami Otsoa d’avoir bravé la pluie avec lui pour prendre les photos des lieux cités.
sources :
articles :
- Jean MEYER, SAINT-BARTHÉLEMY (1572), Encyclopædia Universalis [en ligne],
- Julien ROUSSET, Quand Patrice Chéreau ensorcelait Bordeaux, sudouest.fr, 9 octobre 2013.
images :
illustration de l’article : Monument des Girondins (fr.wikipédia.org), Isabelle Adjani (allocine.fr). Les photos du film sont extraites à l’aide du logiciel VLC.
Toute une histoire ! 😉
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