En ce 8 mai, jour de l’Armistice 1945, nous avons pensé qu’il serait intéressant d’évoquer non pas la Seconde Guerre Mondiale, véritable point Godwin de notre société actuelle mais, une autre, moins connue, mais toute aussi douloureuse : la guerre d’Indochine.
Pour ce faire, braquons nos projecteurs sur La 317ème Section, film tout aussi méconnu et oublié.
Le cinéma français a souvent du mal avec l’histoire du pays, a fortiori quand il s’agit d’évoquer des conflits perdus.
Là, où son homologue américain a multiplié les productions pour exorciser le traumatisme du Vietnam, les films français ayant pour toile de fond la guerre d’Algérie, ou la guerre d’Indochine ne sont pas légion…
Un cinéaste cependant l’a fait : Pierre Shoendoerffer.
En 1965, il adapte son propre roman pour nous livrer sa vision de la guerre d’Indochine. L’homme est particulièrement bien placé pour en parler en tant qu’ancien membre du Service Cinématographique des Armées durant le conflit.
On suit pendant une semaine la marche difficile de la 317ème section qui a reçut l’ordre de se replier face à l’offensive massive Viet-Minh…
L’équipage mené par le très jeune et charismatique lieutenant Torrens (Jacques Perrin) et l’adjudant Willsdorf (Bruno Cremer) tente de se frayer un chemin dans la jungle, faisant face aux moustiques, sangsues mais surtout aux nombreuses escarmouches avec l’ennemi qui sèment à chaque fois son lot de morts et de blessés dans les rangs…
Trente-trois ans avant Spielberg, Shoendoerffer choisit l’approche réaliste dans sa mise en scène, filmant au plus près des acteurs pour adopter leur point de vue : comme eux, on ne voit l’ennemi qu’au travers des jumelles ou de la lunette du fusil. Comme eux, on est aux aguets, se concentrant sur le moindre bruit suspect, les moindres tirs…
La faible utilisation de la musique donne toute sa place aux sons environnants, on est au cœur de la jungle. Cela crée un sentiment d’immersion assez incroyable, nul besoin dès lors de miser sur le spectaculaire, les explosions, les blessures impressionnantes etc…
L’ennemi, bien que la plupart du temps invisible, est partout et semble resserrer son étau chaque jour un peu plus.
Chacun des membres de la section semble sentir que l’issue ne sera pas heureuse. Le spectateur partage cette même sensation et se sent d’autant plus proche des protagonistes. Le noir et blanc renforce aussi l’idée d’une certaine noirceur de l’atmosphère…
La réussite de ce film repose également sur l’excellent travail des comédiens qui se sont véritablement investis dans le projet en acceptant les conditions imposées par le réalisateur (l’équipe a bivouaqué un an dans la jungle cambodgienne !).
Jacques Perrin (que l’on connaît aujourd’hui pour ses documentaires), seulement âgé de 24 ans à l’époque, impressionne par son assurance et la justesse de son jeu.
La 317e Section rend également hommage au regretté Bruno Cremer et prouve que sa carrière ne se résume pas au rôle du commissaire Maigret dans la soporifique série télé des années 90.
source : secrets de tournage, allocine.fr.