Cela fait un peu plus de deux semaines que notre cher Astérix est de retour sur grand écran, en chair et en os, sous les traits de Guillaume Canet.
Ses retrouvailles au cinéma ne sont pas particulièrement célébrées par les gazettes gauloises…
Il faut dire que les différentes bandes annonces ne laissaient présager rien de bon : blagues pas drôles débitées par une bande de potes qui ne semble pas vraiment y croire elle-même…
Pour autant, il faut savoir se libérer des aprioris potentiels et ne pas juger une œuvre uniquement sur des extraits.
En effet, il y a des choses intéressantes dans ce film : en premier lieu, Gilles Lellouche qui campe un Obélix touchant, bien dans l’esprit de la bande dessinée.
Le challenge était d’autant plus difficile qu’il fallait passer derrière l’immense Gérard Depardieu qui, en plus d’incarner le rôle, devenait littéralement le personnage dans les films précédents !
Audrey Lamy est également plutôt juste en Bonnemine au caractère bien trempé qui n’hésite pas à faire la leçon à Abraracourcix (Jérôme Commandeur), son mari de chef.
Enfin, l’ouverture du film (avec ce plan en plongée sur le village gaulois, joliment reconstitué en 3D), puis l’apparition du duo Astérix et Obélix, de retour d’une chasse au sanglier dans la forêt, laisse penser qu’un univers est en train de se créer à l’écran, et que l’on va passer un délicieux moment…
Il n’en sera rien malheureusement !
Les belles impressions du début s’envolent dès la première réplique : Astérix veut manger moins de viande et s’inquiète des effets à long terme de la potion magique sur son corps… où comment évoquer, aux forceps, les problématiques de santé actuelles, avant même d’avoir enclenché la moindre intrigue ni le moindre enjeu !
De l’enjeu d’ailleurs, il n’y en aura jamais vraiment…
On voyage vers la Chine et on passe de temps en temps faire un coucou à César (Vincent Cassel, cabotin comme jamais…) qui décide, lui aussi finalement, de faire un saut du côté de l’empire du milieu…
En attendant, il faut tenir 1 h 51 donc on meuble avec des enchaînements de jeux de mots pas drôles… tellement pas drôles, que l’on est bientôt plus occupé à tenter de reconnaitre les célébrités grimées à la gauloise, qu’à suivre les dialogues… les personnages s’effacent derrière les célébrités…
On ne peut même pas se consoler avec la réalisation de Guillaume Canet, aussi peu inspirée que le scénario… pourtant, il est capable de filmer des séquences ambitieuses (on pense en particulier à la fuite de François Cluzet à pied, en pleine autoroute dans Ne le dis à personne en 2006 !).
Les bagarres, à hauteur d’hommes, manquent terriblement d’ampleur et d’un travail chorégraphique visuellement intéressant…
Les comédiens et comédiennes font ce qu’ils peuvent dans ces séquences mais ne parviennent pas à les rendre spectaculaires…
Pour ne rien arranger, les effets spéciaux ne sont pas au niveau et semblent n’être qu’un simple recyclage de ceux utilisés dans le premier film… sorti il y a 24 ans !
On sent l’acteur-réalisateur, prisonnier d’un cahier des charges voulu par les producteurs qui l’empêche d’apposer véritablement sa patte sur le monde crée par Uderzo et Goscinny.
C’est quand même embêtant à ce niveau de production (65 millions d’euros !!!)… tout est décevant, même les décors !
Ils paraissent étriqués, ils manquent d’âme et de patine… cela peut fonctionner au théâtre mais beaucoup moins à l’échelle d’une grosse production comme Astérix…
Ajoutez à cela, un scénario vide, sans rythme, des dialogues qui tombent à plat et on ne peut éviter de voir le ciel nous tomber sur la tête !
Pourtant, j’aurais aimé… aimer cette nouvelle aventure du petit Gaulois !
Mais, force est de constater, que la presse a raison dans son ensemble de délivrer une appréciation très négative du film… on ne peut pas, honnêtement, le sauver du naufrage…
Le pauvre Guillaume Canet semble lui-même en avoir conscience : son Astérix est effacé, presque dépressif ! On s’étonne même de ne pas le voir prendre la poudre d’escampette à Arcachon !
Il a sûrement fait de son mieux avec les contraintes qu’il avait, mais l’univers d’Uderzo et Goscinny n’est tout simplement pas fait pour lui…
D’une manière plus générale, l’art comique exige une grande maîtrise et un sens inné du bon tempo…
On l’a ou on ne l’a pas.
Si on ne l’a pas, mieux vaut alors ne pas s’y essayer.
Ce n’est pas grave de ne pas savoir faire rire, on peut tout à fait s’épanouir dans d’autres genres que la comédie lorsqu’on est réalisateur ou réalisatrice.
Quant à nous autres spectateurs, on peut oublier notre déception grâce aux récentes aventures animées d’Astérix signées Louis Clichy et Alexandre Astier, sorties respectivement en 2014 et 2018 (Astérix – Le Domaine des Dieux et Astérix – Le Secret de la Potion Magique).
Contrairement à cet Empire du Milieu bien vide, ce sont de vraies réussites qui respirent l’amour de l’œuvre originale, par Toutatis !
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Image d’en-tête : © Christophe Brachet